Brève histoire de l'escadre
Formé en 1935 à partir du Fliegergruppe Döberitz, le Jagdgeschwader « Richthofen » (du nom du célèbre as de la première guerre mondiale) est une unité chargée de faire perdurer les traditions de chasse dans la jeune Luftwaffe en pleine création. Elle est dotée de Heinkel He 151 utilisés principalement lors de parades publiques dans des configurations de vols en formation et des manœuvres acrobatiques.
Les deux premiers succès, des Curtiss H-75 du GC II/4, sont obtenus au-dessus de la Sarre le 22 novembre 1939. L’invasion de l’Ouest voit le palmarès du JG 2 s’étoffer pour atteindre 185 victoires à la capitulation française. C’est à ce moment que l’escadre prend ses quartiers à Beaumont-le-Roger (Eure) qui devient sa principale base pour les quatre années suivantes.
En juillet 1940 débute la bataille d’Angleterre qui est une campagne éprouvante pour la Luftwaffe. Le JG 2 s’y distingue par des faits d’armes qui forgent sa réputation comme les 22 victoires obtenues le 11 août ou les 12 du 26 septembre.
La première année de guerre du Geschwader s’achève sur un palmarès sans appel : plus de 450 victoires pour la perte de 36 pilotes.
L’année 1941 voit le JG 2 associé aux JG 26 et une partie du JG I assumer le rôle de rempart à l’ouest contre les incursions de la RAF ; en effet le début des hostilités sur le front de l’est en juin provoque le départ de la plupart des groupes de chasse. Les pilotes se mesurent chaque jour à leurs homologues britanniques et malgré des effectifs numériquement inférieurs ils parviennent à détruire un grand nombre d’appareils. Mais le statu quo ne tarde pas à être remis en question par l’arrivée durant l’été 1942 d’un nouveau protagoniste sur le théâtre d’opération atlantique : l’USAAF. Les raids américains sur les côtes et le nord de la France s’intensifient en automne et la Luftwaffe se familiarise avec les B-17 et B-24.
L’opération Torch (débarquement allié en Afrique du nord le 11 novembre 42) provoque un bouleversement de l’échiquier : l’invasion de la zone libre française par la Wehrmacht. C’est à cette occasion que le I./JG 2 va faire connaissance une première fois avec la Provence en s’installant à Marignane en prévention d’une éventuelle opération alliée.
La guerre sur le continent africain gagne en intensité et le II./JG 2 part pour Bizerte (Tunisie) vers le 15 novembre, rejoint bientôt par le 1./JG 2 qui devient une composante du JG 53 déjà sur place. C’est une occasion d’augmenter le palmarès de l’escadre face à des appareils moins performants et des pilotes américains en période d’acclimatation aux opérations en zone de guerre. Le contingent africain obtient 112 victoires pour la perte de 9 pilotes et 19 appareils.
A la mi-mars 1943 le Geschwader se retrouve au complet en Normandie pour faire face à une pression alliée en constante augmentation. C’est à ce moment que les I. et II./JG2 perçoivent les nouveaux Bf 109G-6 beaucoup plus aptes à mener des combats au-dessus de 6000m.
L’efficacité du JG 2 devient source de réflexion pour l’état-major allié. Des raids massifs sur les aérodromes de l’escadre sont décidés. Ainsi les 28 juin, 15 et 16 août 1943 les terrains sont la cible des quadrimoteurs de l’USAAF : 34 pilotes décèdent et plus de 30 appareils sont détruits. Il est désormais essentiel de disséminer les unités sur un nombre plus important de bases. Ainsi des terrains dits auxiliaires sont utilisés dans tout le nord-ouest de la France.
La crise des effectifs et de la formation des pilotes de la Luftwaffe touche le JG2 ; la cohésion s’en fait ressentir et le ratio victoires/pertes s’effondre. L’année 43 affiche un tableau plus sombre que précédemment : 730 avions sont perdus pour toutes sorte de causes (combats, bombardements, accidents), 200 pilotes sont décédés et une centaine d’autre hors combats suite à des blessures. Les victoires de cette même année culminent à 645.
La situation stratégique est défavorable à la Luftwaffe en 1944. Les forces aériennes alliées disposent désormais non seulement de la supériorité aérienne mais aussi technique. Les chasseurs que l’escadre affronte possèdent des performances supérieures et sont pilotés par des équipages possédant une solide expérience et une formation aboutie.
Les raisons du déplacement
Depuis la fin octobre 1943 les raids de la 15th Air Force décollant d’Italie du sud ciblent les côtes méditerranéennes françaises et la région Rhône-Alpes. Dès lors la Provence ne peut être protégée efficacement avec le seul Ergänzungs-Jagdgruppe Süd et sa quarantaine de chasseurs de tout type (Bf 109F-4/G-4/G-6 et Fw 190A-4/5/6). Il incombe au I./JG 2 de venir étoffer la défense de l’espace méridional. C’est chose faite à la mi-janvier lorsque le Gruppe s’installe à Aix-en-Provence avec ses quatre Staffeln : les 1., 2. et 3. principalement sur Fw190A-6 (28 appareils) et le 4. sur Bf 109G-6 (12 appareils). L’aide apportée n’est pas que quantitative car les nouveaux arrivants sauront se montrer coriaces faces aux incursions des alliés. Sous les ordres de l’Hptm. Erich Hohagen le groupe est une formation d’élite habituée à combattre en sous nombre.
Mi-janvier -> 20 février 1944
27 janvier : le I./JG 2 redistribue les cartes
L’escadre allemande occupe depuis quelques jours le terrain de Le Luc - La Grande Bastide où ses deux premiers Staffeln stationnent. Le reste du JG 2 ainsi que les services techniques sont basés à Aix-les-Miles.
La météo est clémente sur le sud de la France. Le soleil brille et seule une brume de haute altitude est signalée. En fin de matinée le thermomètre atteint les 10° au sol sur le pourtour méditerranéen.
A 10h50 l’alarme retentit à La Grande Bastide et des pilotes se ruent vers les quatre appareils prêts à décoller. Les moteurs rugissent ; les Fw 190 s’ébranlent et gagnent de la vitesse sur la piste. Alors qu’ils viennent à peine de prendre l’air surgissent huit Spitfire Vc (t) du 52th FG. Ces derniers sont partis à 10h00 de Calvi (Corse) pour une reconnaissance armée au-dessus des terrains du Var afin d’identifier les raisons de l’augmentation d’activité aérienne signalée depuis quelques jours. Observer et au besoin détruire.
Quatre Spitfire menés par le 1st Lt Cornwell se chargent des adversaires laissant le flight du Major Houston se mettre en position pour un straffing en règle de la piste et de ses abords.
Cornwell et son ailier, le 2nd Lt Beedle, virent pour se placer sur les arrières du dernier appareil allemand à avoir pris l’air. Combinant la puissance de leurs armes de bord ils ne lui laissent aucune chance de salut et le Focke Wulf s’embrase, se retourne sur lui-même et s’abat 400 m après la fin de la piste dans une terrible explosion qui bientôt provoque un incendie dans les bois alentours. Il est 10h56, le Fw. Alexander Werba est parvenu au terme de sa vie.
Les deux appareils américains (2nd Lt Kater et 2nd Lt Burchfield) laissés en couverture signalent six nouveaux adversaires au décollage et tentent de les coiffer en bonne position. Focalisés sur leurs nouvelles cibles ils n’avertissent pas Cornwell et Beedle de la présence dans leur dos des trois Fw 190 survivants de la première vague. C’est à ce moment que les chasseurs deviennent à leur tour des proies. Menés par l’Ofw. Siegfried Lemke, Staffelführer du 1./JG 2, les trois aéronefs à croix noires poursuivent les deux Spitfire dont la vitesse ne peut égaler la leur. Lemke se rapproche et à 300m déclenche son tir sur l’appareil de tête. Le Spitfire de Cornwell, sévèrement touché, s’abat au nord-est de Hyères. Beedle se démène pour éviter les rafales et bientôt ses appels radio conduisent Kater et Burchfield à lui venir en aide. Parvenus au milieu de la mêlée ils font feu sur les appareils allemands mais l’angle de tir et la vitesse des cibles ne permet pas une grande précision. Ils ne peuvent qu’assister, impuissants, à la chute de leur camarade qui vient de succomber sous les tirs de Lemke. Décidés à ne pas en rester là ils continuent le combat mais par inexpérience ils ne tardent pas à tomber dans le piège que les pilotes de la Luftwaffe viennent de leur tendre. Laissant leur n°3 jouer le rôle d’appât et prendre une direction différente de la leur, le Staffelführer et son ailier basculent rapidement et se retrouvent sur le quart arrière droit des pilotes américains qui surpris par une telle manœuvre se séparent. Cela revient à tirer à la courte paille celui qui gagne le droit de se faire abattre. C’est chose faite et Kater succombe sous les tirs de Lemke et du Lt Süss qui regardent le Spitfire s’écraser au nord d’Hyères. Burchfield profite de la situation pour prendre la fuite en direction du sud à pleine vitesse. Il rejoint au-dessus de la Méditerranée le flight Houston qui gêné par les six Focke Wulf de la seconde vague n’a pas réussi à mener son action contre le terrain de la Luftwaffe.
De leur côté, les neuf appareils allemands se posent dans le calme avec la satisfaction d’avoir évité la destruction de leur base. Il est 11h20 et une quiétude de courte durée retombe sur le Var.
12h10 : une armada aérienne est signalée entre Marseille et Saint-Raphael. De très nombreux appareils de la 15th Air Force (170 quadrimoteurs escortés par une soixantaine de P-38 des 1st, 14th et 82nd FG) se dirigent vers les aérodromes du sud-est de la France. L’alarme est sonnée tant pour le I./JG 2 que pour les appareils disponibles au JGr Süd ; en tout 35 Bf 109 et Fw 190 prennent l’air en direction des intrus.
70 B-17 en deux vagues s’en prennent au terrain d’Aix dès 12h22 et larguent 120 bombes qui endommagent la piste. 27 B-24 ciblent Istres à 12h23 et détruisent des hangars tandis que la base de Montpellier-Fréjorgues est sévèrement pilonnée par 56 B-17 vers 12h30. Enfin 15 B-24 provoquent des dégâts considérables aux chantiers navals situés au sud de Montpellier.
Huit Fw 190A-6 du 2./JG 2 s’en prennent aux B-17 du 99th BG qui lâchent leurs projectiles au-dessus d’Aix. Les dix-sept P-38 d’escorte jouent parfaitement leur rôle de chiens de berger et perturbent les agresseurs qui n’arrivent pas à attaquer en groupe. Seuls deux appareils parviennent à percer le rideau protecteur et se ruent sur les B-17 mais ils ne leur causent aucun dommage conséquent. En revanche, le feu défensif des quadrimoteurs atteint l’avion du Staffel Kapitan, le 6 « rouge », piloté par l’Oblt Karl Haberland (vétéran titulaire de 12 victoires) qui doit s’extraire d’une monture devenue incontrôlable. Malheureusement le parachute se met en torche et le pilote décède.
Du côté du 4./JG 2 six Bf 109G-6 interceptent au-dessus du Var la seconde vague de bombardiers qui se dirigent sur Aix. Ils sont accompagnés par quatre autres appareils du JGr Süd. Seuls cinq P-38 se trouvent dans les parages à ce moment et bien qu’en infériorité numérique ils engagent l’ennemi. La première passe est frontale et les adversaires se perdent de vue. C’est à ce moment que les chasseurs américains tombent sur deux Fw 190 du 1./JG 2 isolés. Ceux-ci éclatent leur formation et se séparent ; mais si cette manœuvre perturbe le dispositif des P-38, le 1st Lt Norman W. Jackson continue de suivre sa cible et parvient à couper son virage. Le tir est bref et précis ; l’avion allemand perd des pièces de fuselage, prend feu et pique vers le sol. Son pilote, le Ltn Johann Santler réussit à s’en extraire et après l’ouverture de son parachute peut apercevoir le Focke Wulf terminer sa trajectoire près de Meyrargues (Bouches du Rhône). Il est 12h20.
Le combat contre les B-17 se poursuit. L’Uffz Otto Karbaum abat un P-38 aux alentours de Cassis à 12h30 peu avant la victoire de l’Oblt Georg Schröder qui achève un quadrimoteur déjà endommagé. Celui-ci finit par s’écraser à l’est de Pertuis après avoir été évacué par neuf membres d’équipage.
Quelques escarmouches ont lieu dans la demi-heure qui suit mais aucune perte de part et d’autre n’est enregistrée.
Le premier engagement du I./JG 2 s’achève en sa faveur : trois appareils abattus, deux pilotes tués pour cinq victoires. De son côté le JGr Süd se voit crédité de deux succès : l’Uffz Rudolf Ackermann abat un P-38 dans la mêlée au-dessus du Var et le Ltn Josef Törfer sort vainqueur d’un combat épique contre un B-17 au-dessus de Salon-de-Provence. Cette unité perd plusieurs appareils au combat : trois contre le 1st FG aux alentours de Montpellier et un autre suite aux dégâts subis (crash lors de sa tentative d’atterrissage d’urgence à Marignane).
Le bilan Général est proche de l’équité de part et d’autre. Mais l’action de la Luftwaffe n’a pu empêcher l’USAAF de traiter les cibles et de causer d’importants dégâts.
Dans les faits, le plus grand succès du jour est la défense du terrain de La Grande Bastide. Sa destruction aurait amputé la chasse allemande de sa composante de réponse avancée. Cet échec tactique de l’aviation américaine aura des conséquences non seulement locales mais aussi sur le théâtre d’opération italien comme nous le verrons plus tard.
Pertes de la Luftwaffe le 27 janvier 1944 dans le sud de la France
Type d’avion |
Wknr. |
Code |
Unité |
Lieu |
Nom |
Cause |
Fw. 190A-6 |
470013 |
6 rouge |
2./JG 2 |
Aix-en-Provence « Val saint André » |
StaKa. Oblt. Karl Haberland (décédé) (parachute en torche) |
Touché par tirs des B17 |
Bf-109 |
?/JGr. Süd |
Alentours de Montpelier-Fréjorgues |
Abattu par Lt Daniel Jr Darnell (94th FS/1st FG) sur P38 |
|||
Bf-109 |
?/JGr. Süd |
Alentours de Montpelier-Fréjorgues |
Abattu par 1st Lt Robert A.Vrilakas (94th FS/1st FG) sur P38 |
|||
Bf-109 F-4 |
10267 |
1 blanc |
?/JGr. Süd |
Alentours de la base de Nîmes |
Uffz.Franz Berger (blessé) |
12h50. Abattu par 1st Lt Marvin V. Windgrove (27th FS/1st FG) sur P38 |
Fw. 190A-6 |
470210 |
2./JG 2 |
Colline de Pierrefeu |
Uffz. Alexander Werba (décédé) |
Abattu par 2 Spitfire du 52th FG (Lt Cromwell et Lt Beedle) |
|
Fw 190A-6 |
531064 |
1./JG 2 |
Peyrolles-Jouques, le « Logis d’Anne » |
Ltn. Johann Santler (indemne) |
12h20. Abattu par 1st Lt Norman W. Jackson (49th FS/ 14th FG) sur P38 |
|
Bf-109 F-4 |
7471 |
13 bleu |
4/JGr. Süd |
3 km au sud de Marignane |
Ltn.Hartmann von Manndorf (décédé) |
S’écrase suite aux dégâts reçus en combat alors qu’il tentait de se poser |
Victoires de la Luftwaffe le 27 janvier 1944 dans le sud de la France
Grade
|
Nom |
Prénom |
Staffel |
Unité |
Victoire |
Lieu |
Ofw. |
Lemke |
Siegfried |
1 |
JG 2 |
Spitfire Vc (t), JK-945, 52nd FG, 4th FS, 1st Lt Ottaway Bethard Cornwell (décédé) |
Alentours de Pierrefeu |
Ofw. |
Lemke |
Siegfried |
1 |
JG 2 |
Spitfire Vc (t), JK 705, 52nd FG, 4th FS, 2nd Lt Harold Jr Beedle (décédé) |
Alentours de Pierrefeu |
Ofw. Ltn. |
Lemke Süss |
Siegfried |
1 |
JG 2 |
Spitfire Vc (t), JK 602, 52nd FG, 4th FS, 2nd Lt Lyle Richard Kater (décédé) |
Alentours d’Hyères en mer |
Uffz. |
Karbaum |
Otto |
4 |
JG 2 |
P-38G, 43-2543, 14th FG, 49th FS, 2nd Lt James G. Jr Riley (décédé) |
Golfe de la Ciotat |
Oblt. |
Schröder |
Georg |
4 |
JG 2 |
B-17F, 42-5746, 99th BG, 347th BS (1 décès, 2 évadés, 7 prisonniers) |
Lançon de Provence |
Uffz. |
Ackermann |
Rudolf |
1 |
JGr. Süd |
P-38G, 43-2545, 14th FG, 49th FS, 2nd Lt Harry Greenup (prisonnier) |
Baie de Lecques / Saint-Cyr-sur-Mer |
Ltn. |
Törfer |
Josef |
2 |
JGr. Süd |
B-24, 41-28592 |
Etangs est de Istres |
Des montagnes que l’on ne peut gravir
La fin du mois de janvier et les premiers jours de février se déroulent dans le calme et les vols de routine remplacent les missions de guerre. C’est aussi l’occasion de mettre à profit ce répit pour entretenir les aéronefs et compléter les effectifs. Le 3 février deux pilotes du 2./JG2 partent par avion de liaison pour la base de Dijon afin de percevoir deux Fw 190A-7 flambants neufs. Les Uffz. Werner Edelmann et Hans Pusch sont des vétérans respectivement incorporés dans le Staffel en 1941 et 42. L’honneur leur revient de troquer des montures essoufflées contre d’autres plus performantes : nouveau collimateur, armement accru et moteur doté d’un système de suralimentation à l’oxyde nitrique.
Le lendemain, peu après le lever du jour les deux avions décollent de Longvic. Le trajet doit s’effectuer par un temps très couvert puisqu’en ce 4 février seul le littoral méditerranéen peut profiter d’un timide soleil. Pour compléter un tableau déjà bien encombré, la neige se mêle aux intempéries sur le sud de la Bourgogne et le nord de la région Rhône-Alpes. Sans doute pour échapper à ces conditions hostiles la trajectoire que suivent les deux pilotes les amènes à survoler les contreforts des Alpes à 9000 pieds où la météo est moins catastrophique.
Pusch et Edelmann n’atterriront jamais à Aix et grandiront la liste des portés disparus. Ce n’est qu’au printemps, quelques mois plus tard, que fortuitement les corps des pilotes et les débris des appareils seront retrouvés sur le glacier de Sarennes dans le massif des Grandes Rousses à 3000 m d’altitude. Les circonstances de l’accident ne sont pas connues mais la grande dispersion des débris peu laisser à penser que les Focke Wulf se sont percutés en vol.
La tristesse et le deuil n’ont pas leur place en temps de guerre et le cours des événements efface bien vite les fluctuations d’humeur.
Il est 13h30 quand l’alarme retentit sur l’ensemble des bases de chasse provençales. Les radars situés le long de la côte signalent une importante concentration d’appareils ennemis en direction du Var et des Bouches-du-Rhône. Une cinquantaine de chasseurs des JG 2 et JGr. Süd partent à la rencontre de 97 Forteresses Volantes. Ces dernières se scindent et prennent la direction des cibles du jour :
25 appareils allemands interceptent le raid sur Toulon alors que le bombardement vient de commencer. C’est à 7000m, au milieu des tirs de Flak et des bombes de 250 kg qui tracent des segments verticaux qu’une folle mêlée s’engage après une passe frontale où les adversaires se croisent à plus de 750 km/h. Les Focke Wulf et les Messerschmitt attaquent par petits groupes de quatre ou cinq, arrosent les quadrimoteurs et se faufilent dans le barrage de feu créé par les centaines de mitrailleuses « 50 ».
«Lors de la mission sur Toulon le 4 février 1944, je volais en position de mitrailleur de flanc droit. Environ une ou deux minutes avant de lâcher les bombes, mon pilote, le Lt. Col. ALLEN nous avertit de la présence de chasseurs à 11h. Quelques secondes plus tard j’ai aperçu des balles traçantes passer près de la fenêtre de droite et soudain je vis le bombardier à notre droite exploser.
Je n’ai pas aperçu de parachute et je doute que l’équipage ait pu sauter puisque cela a eu lieu avant qu’ils n’aient pu lâcher leurs bombes.»
S/Sgt. Delmar C. MARKLE
340th Bomb Sqn / 97th Bomb Gr.
Se frayer un passage à grande vitesse au milieu de dizaines de B-17 crachant du feu de toutes parts est un exercice réclamant non seulement un courage et une habileté hors norme mais aussi une dose de chance non négligeable. Cette dernière abandonne le Lt.Rudolf Detmar lorsqu’à bord de son Bf 109G-6 aux couleurs du 4./JG 2 il prend pour cible le bombardier piloté par le 2nd Lt Albert F. Myer. Est-il touché par des tirs ou manque t-il des dixièmes de secondes nécessaires à la correction de sa trajectoire ? Le chasseur percute le B-17G. Le choc à plus de 500 km/h est terrible. Le quadrimoteur américain, coupé en deux, semble demeurer suspendu dans les airs quelques instants avant d’exploser. Quant au Messerschmitt réduit à l’état d’épave, il continue sa chute et percute la mer au sud-est de Toulon.
Le combat fait rage durant près d’un quart d’heure. Les monomoteurs tirent, s’évadent et reviennent à la charge. Si les salves font mouche elles ne parviennent pas à abattre des bombardiers qui une fois leurs soutes vides prennent un large virage au sud entre La Seyne et Sanary pour s’en retourner vers l’est et leur base d’Amendola en Italie. Le combat tourne même en défaveur des défenseurs lorsque le feu des Flying Fortress atteint l’Uffz. Friedrich Schimscheimer qui s’écrase non loin de la plage de l’Almanarre au sud d’Hyères.
Les B-17 sont une nouvelle fois interceptés à 6500m au sud de Nice par plusieurs FW 190 du 1./JG 2. Le combat est nettement plus bref que le précédent. Un groupe de quatre chasseurs emmenés par Sigfried Lemke focalise son attention sur un bombardier du 2nd BG qui traine un long panache de fumée. Le tir précis incendie deux moteurs. L’avion glisse sur sa gauche et pique brutalement vers les flots. Cinq parachutes s’échappent du monstre en perdition.
La victoire est accordée au leader du quatuor d’attaquants, une de plus pour celui qui s’est illustré quelques jours plutôt au-dessus du Var.
L’équipage du B-17F 42-29903, « High Tension II », appartenant au 429th BS ne sera jamais retrouvé malgré plusieurs missions de secours.
Du côté de Saint-Raphael le raid sur le viaduc d’Anthéor conduit par le 301st BG s’effectue à 7500m. Une quinzaine d’appareils allemands tentent d’aborder la formation de bombardiers mais ceux-ci forment un dispositif encore plus compact que celui du raid sur Toulon. Le combat tourne court et aucune victoire n’est marquée au profit d’un des deux camps.
Le résultat des opérations de bombardement est différent d’une cible à l’autre. Si le viaduc reste intact et que les seules voies d’accès sont touchées, le port et la ville de Toulon sont ravagés par le déluge de bombes. Le croiseur de la Marine Nationale « Jean de Vienne » est sévèrement endommagé ainsi que le « Dunkerque ». Quatre bâtiments de petite taille sont envoyés par le fond.
La Kriegsmarine perd trois sous-marins qui ne seront opérationnels qu’après plusieurs mois de réparation. Des incendies détruisent les ateliers et une partie des entrepôts du port.
La ville reçoit de nombreux projectiles et dans les décombres sont dénombrées 48 victimes et une cinquantaine de blessés.
Une fois de plus le dispositif de défense aérienne de la Luftwaffe se trouve impuissant à contrecarrer les ambitions des Alliés. Malgré un déploiement de grand style les I./JG 2 et JGr Süd se brûlent les ailes contre des formations de bombardiers pourtant dépourvues d’escorte.
Pertes de la Luftwaffe le 4 février 1944 dans le sud de la France
Type d’avion |
Wknr. |
Code |
Unité |
Lieu |
Nom |
Cause |
Fw 190A-7 |
340267 |
2./JG 2 |
Glacier-de-Sarennes (Alpe d'Huez) |
Uffz. Hans Pusch (décédé) |
Accident lors d'un vol de convoyage (collision en vol présumée) |
|
Fw 190A-7 |
470217 |
2./JG 2 |
Glacier-de-Sarennes (Alpe d'Huez) |
Uffz. Werner Edelmann (décédé) |
Accident lors d'un vol de convoyage (collision en vol présumée) |
|
Bf 109G-6 |
27074 |
|
4./JG 2 |
Plage de l’Almanarre, sud d’Hyères |
Uffz. Friedrich Schimscheimer (décédé) |
Abattu par une formation de B-17 lors du raid sur Toulon |
Bf 109G-6 |
410493 |
|
4./JG 2 |
En mer au sud-est de Toulon |
Ltn. Rudolf Detmar (décédé) |
Collision avec le B-17G 42-31667 du 97th BG |
Pertes de l’USAAF le 4 février 1944 dans le sud de la France
Type d’avion |
s/n |
Unité |
Lieu |
Nom |
Cause |
B-17G |
42-31667 |
341st BS/97th BG |
Sud-est de Toulon |
2Lt Albert F Myer (Pil) F/O Billy 0 Walker (CoP) 2Lt Randolph H Smith (Nav) 2Lt Francis L Jr Barr (Bomb) T/Sgt Charles AJr Keiper (Rad/M) T/Sgt John P Jr Woodruff (Mec/M) S/Sgt Charles H Busing (MitG) S/Sgt Allen E Carson (MitD) S/Sgt Lawrence L Claxton (MitV) S/Sgt Seymour Berkowitz (MitA) |
Collision avec le Bf 109G-6 du Ltn. Rudolf Detmar |
B-17F |
42-29903 |
429th BS/2ndBG |
Une centaine de kilomètres au sud de Nice |
1Lt Rhtherford Bingham (Pil) 2Lt Dabriey H. Jr Lea (CoP) 2Lt Laurence T. Armstrong (Nav) 2Lt Hamilton M. Lamb (Bomb) T/Sgt Carbin M. Doolittle (Rad/M) S/Sgt Robert K. Slocum (Mec/M) S/Sgt Frederick M. Jr Lemon (MitG) S/Sgt Max Copp (MitD) S/Sgt Rex D. Power Claxton (MitV) T/Sgt John M. Lawry (MitA) |
Abattu par l’Ofw. Lemke du 1./JG 2 |
*L’Ofhr. Otto Wania du 4./JG 2 et l’Ofw. Rainer Pöttgen du 1./JGr Süd se voient chacun crédité d’un B-17 au-dessus de Toulon mais dans les faits il n’en est rien, tout au plus ont-ils sévèrement endommagé leur adversaire.
Après les événements de 4 février le mauvais temps s’installe sur le littoral méridional. Aucun raid de la 15th Air Force n’est envisagé sur la zone. De son côté la Luftwaffe assure le service minimum avec quelques patrouilles de quatre avions lorsque la météo le permet.
Le 9 février la couverture nuageuse devient moins dense et depuis le matin les vols de reconnaissance de l’USAAF reprennent. Au retour de l’un d’eux, une fois les clichés développés, il est établi la présence de trois cargos de fort tonnage dans le port de Nice.
Aussitôt une mission est montée. Il incombe au 52th FG de couler les navires tant qu’ils sont immobiles. Quatre Spitfire Vc (t) décollent de Calvi à 13h55. Ils sont commandés par le F/O James Howe Jr Montgomery dont l’indicatif est « Black 1 ».
Le soleil est absent en ce jour et dès 10000 pieds la brume recouvre la Méditerranée. La visibilité ne dépasse pas 20 km tout au plus.
14h30 : la ville de Nice est en vue et les appareils américains se positionnent pour l’attaque. Parvenu à la Baie des Anges, le flight prend la direction de l’est en suivant la Promenade des Anglais, survole le château et pique sur le port. 500 mètres séparent chaque avion. Durant la manœuvre « Black 4 », un autre Montgomery, mais prénommé Henry E., 2nd Lt, suspecte la présence de chasseurs dans son dos. L’attaque se poursuit et les huit bombes sont lâchées par le travers du premier cargo visible depuis une altitude de 3500 pieds. Seules deux d’entre elles (celles du 1st Lt Bradley-Smith, « Black 3 ») touchent au but provoquant immédiatement un incendie. La Flak, bien que dotée uniquement de bi et quadri tubes de 20mm, se réveille et encadre les assaillants qui bifurquent vers le sud en grimpant.
C’est à ce moment que « Black 2 », le F/O Hoover, avertit ses équipiers que quatre chasseurs ennemis piquent sur eux à 8H. Les Spitfire de séparent en deux groupes et se retournent pour faire face. Le dogfight est suivi depuis la côte par des dizaines de niçois éberlués. Dès les premiers instants, Hoover est pris sous les tirs ; son moteur s’arrête et prend feu. En quelques secondes il repousse sa verrière et saute dans le vide. Une fois son parachute ouvert il se retrouve en première place pour contempler la bataille. Il est 14h45 lorsqu’il amerrit et se débarrasse des sangles devenues encombrantes.
« Black 4 » aperçoit après un break le parachute flottant sur la surface de la mer. Il découvre sa radio en panne alors qu’il essaie de transmettre l’information. Puis c’est au tour de sa jauge d’huile de l’avertir d’un problème. La température monte en flèche, il s’agit surement d’une fuite de glycol provoquée par un projectile ennemi. La situation empire lorsqu’il remarque deux chasseurs à croix noire dans son sillage à 500m.
Les poursuivants de « Black 4 » appartiennent au 1./JG 2 et patrouillaient au-dessus de la Riviera lorsqu’ils surprirent les Spitfire en train de fondre sur le port de Nice. A leur tête, se trouve une fois de plus, comme attiré par chaque joute aérienne, l’Ofw. Lemke.
Henry E. utilise toutes ses ressources pour éviter des tirs qu’il peut désormais entendre tant ils sont proches. Au cours de ses évolutions il aperçoit l’avion de son leader ravagé par un incendie percuter les flots. La mêlée s’éternise et voilà bientôt 20 minutes que tout ce petit monde se livre aux plus ahurissantes acrobaties. Vers 15h00 les FW 190 lâchent prise et permettent aux deux américains survivants de rejoindre leur base. A son retour Henry E. Montgomery découvre de nombreux impacts qui s’étalent le long de son fuselage et sur le capot du moteur.
De leur côté les quatre pilotes allemands se posent à la Grande Bastide. Lemke a à peine le temps de mettre les pieds au sol qu’il est copieusement congratulé pour ses deux nouvelles victoires et l’avion fortement endommagé (qui lui sera plus tard accordé comme abattu). Mais un appel de l’état-major vient de transmettre l’ordre de retourner sur Nice pour faire face à une nouvelle action de l’ennemi contre les navires. Le ravitaillement de leurs avions en essence et munitions terminé, Lemke et son aillier repartent à 15h45.
Sur la base de Calvi la nouvelle du combat et du sort d’Hoover provoque la mise en place d’une « rescue mission » : six Spitfire partent à 16h00 pour la Baie des Anges afin de retrouver la trace de leur compagnon d’armes. Il ne se doutent pas qu’au même moment une vedette rapide allemande du service de secours en mer récupère le pilote américain et le ramène sur la côte.
16h30 : le flight « Yellow » sous les ordres du Major William M. Houston survole à 7000 pieds les lieux du combat précédent. C’est à ce moment que deux appareils ennemis sont signalés à 6H arrivant dans le soleil qui timidement vient d’apparaitre depuis quelques minutes. La formation n’a pas le temps de réaliser un « break » avant que « Yellow 2 », le 2nd Lt John Livermore Bishop, ne soit atteint par une rafale ajustée qui détruit son appareil et le force à l’abandonner. Les cinq Spitfire se reforment et affrontent leurs adversaires qui adoptent une posture offensive en évitant tout combat tournoyant. Leur schéma de vol consiste à attaquer depuis une position haute, tirer en piquant, traverser la formation ennemie et rejoindre une altitude élevée afin de recommencer. Les Spitfire ne peuvent suivre le rythme imposé par les pilotes de la Luftwaffe et se contentent de cercler dans une attitude défensive sans pouvoir trouver des solutions de tir efficaces. Les Focke Wulf réalisent six passages sur le même schéma sans que leurs tirs n’endommagent quiconque puis rompent le combat. Le 2nd Lt Burnett (« Yellow 5 ») affirme avoir touché un des assaillants dont l’avion s’est mis à émettre de la fumée.
Le Lt Bishop, 19e victoire de Lemke, ne sera jamais retrouvé.
A son retour le Major Houston décrit ses adversaires dans son rapport de mission. Il est persuadé d’avoir rencontré une nouvelle version du Fw 190 tant les appareils contre lesquels il a lutté l’ont impressionné en termes de puissance et de manœuvrabilité. Il émet la possibilité d’avoir croisé le fer contre le fameux Fw 190 « long nez » dont la mise au point par l’Allemagne n’est plus un secret mais que personne n’a jamais vu …
Victoires de la Luftwaffe le 9 février 1944 dans le sud de la France
Grade
|
Nom |
Prénom |
Staffel |
Unité |
Victoire |
Heure/Lieu |
Ofw. |
Lemke |
Siegfried |
1 |
JG 2 |
Spitfire Vc (t), WD-R, MA 883, 4th FS/52th FG, F/O Robert Anderson Hoover (prisonnier) |
14h45/Baie des Anges |
Ofw. |
Lemke |
Siegfried |
1 |
JG 2 |
Spitfire Vc (t), WD-D, JK 160, 4th FS/52th FG, F/O James Howe Jr Montgomery (décédé) |
Env. 15h00/ Baie des Anges |
Ofw. |
Lemke |
Siegfried |
1 |
JG 2 |
Spitfire Vc (t), WD-E, EF 647, 4th FS/52th FG, 2ndLt John Livermore Bishop (décédé) |
16h30 / Baie des Anges |
Ofw. |
Lemke |
Siegfried |
1 |
JG 2 |
Spitfire Vc (t), WD-G, JK 148, 4th FS/52th FG, 2ndLt Henry E. Montgomery. Victoire accordée à Lemke mais l’avion parvient à revenir à Calvi fort endommagé |
Le 1./JG 2 vient d’affirmer sa supériorité dans le combat aérien par l’intermédiaire de doctrines adaptées, de son expérience, de la qualité de son matériel et des compétences hors normes d’un de ses meilleurs pilotes. L’Ofw. Siegfried Lemke en deux semaines vient d’abattre six appareils du même squadron de l’USAAF. Cela est aussi la cause de l’inexpérience des adversaires de Lemke dans le domaine du combat aérien. En effet le 52nd FG est une unité utilisée principalement pour le bombardement tactique durant les campagnes d’Afrique du nord, de Sicile et d’Italie. Le rapport du major Houston est éloquent ; face à des adversaires dont la spécialisation est la supériorité aérienne le Group fait pâle figure mais l’ampleur de la différence d’expérience ne lui est pas totalement évidente puisqu’il invoque la possibilité d’avoir eu en face de lui des aéronefs qui ne sont dans les faits pas entrés en service. La qualité de ses pilotes n’est pas le lieu d’un doute, seul un matériel hors norme est responsable de la défaite …
Départ pour le front italien
Durant deux semaines après le fait d’armes au large de Nice, le I./JG 2 n’est plus engagé au combat. C’est une période d’entrainement et de repos. Le point focal de la guerre sur le théâtre d’opération méditerranéen est devenu le débarquement allié à Anzio le 22 janvier.
Le 20 février le Gruppe reçoit l’ordre de se porter sur le terrain de Viterbo afin de renforcer le dispositif aérien de la Luftwaffe en Italie. Désormais les pilotes vont combattre au-dessus de la tête de pont d’Anzio-Nettuno. Jusqu’au 6 avril les victoires s’enchainent mais aussi les pertes. C’est une campagne très éprouvante pour les quatre Staffeln qui reviennent très éprouvés à Aix du 6 au 8 avril. A cette date les effectifs sont fortement diminués : sept Fw 190A-6, quatre Fw 190A-7, trois Fw 190A-7/R6 et quatre Bf 109G-6/R6 soit dix-huit appareils et des pilotes dans un état de fatigue au-delà de l’imaginable. Il est urgent de panser les plaies et de reconstituer les effectifs.
8 avril -> 5 mai 1944
Le mois d’avril permet au Gruppe de ne plus être engagé. Seul le JGr Süd s’acquitte des taches de patrouilles et d’intervention. Les jours se suivent dans la quiétude provençale et les pilotes reprennent un entrainement quotidien. Seul ombre au tableau, l’accident de l’Uffz. Heinz Kartelmeier suite à une panne de moteur à l’atterrissage sur le terrain d’Aix-les-Miles le 22 avril qui contraint le pilote à poser son appareil en urgence. Les équipes de secours le sortiront de la carlingue avec de graves blessures.
Le 29 avril l’enfer s’abat sur Toulon et La Seyne : 53 B-17 (5th Bomb Wing) et 307 B-24 (47th et 304th Bomb Wings + 451st, 460th et 461st BG) escortés par 142 P-38 (1st, 14th et 82th FG) et 36 P-51 (31st FG) se dirigent sur la base navale. 71 appareils du I./JG 2 et du JGr Süd vont participer entre 9h00 et 14h00 à l’interception des vagues ininterrompues de bombardiers.
Le 3./JG 2 intervient avec huit appareils à partir de 12h20 et l’action les porte au sud du port provençal. Nous n’avons pas de trace du combat qui s’en suit si ce n’est que le Lt. Füchs se voit crédité d’un B24 70 km au sud de Toulon.
Les dégâts occasionnés au cours de ce raid sont considérables et les victimes se comptent par centaines : 67 morts et 62 blessés à Toulon ; 129 morts et 65 blessés à La Seyne.
Outre le B 24 cité plus haut, sept quadrimoteurs tombent sur la côte ou en mer comme en témoigne le décompte de l’USAAF. La plupart ont été victimes de la Flak mais le JGr Süd ajoute à son tableau de chasse un B-24, 1 P-51 et 2 P-38. La 15th Air Force paie un lourd tribut et son adversaire principal devient plus que jamais la défense anti-aérienne laissant à la chasse un rôle subalterne.
Le I./JG 2 n’aura plus l’occasion d’intervenir dans le ciel provençal jusqu’à son départ pour Cormeilles-en-Vexin (Val-D’oise) le 5 mai. A cette date il compte 33 Fw 190 et 76 pilotes. De retour sur un territoire de chasse qu’il connait depuis 1940, il sera en première ligne pour la Bataille de Normandie et trouvera de multiples occasions de s’illustrer face à un adversaire à la supériorité écrasante.
Epilogue
Le court passage de ce groupe en Provence ne renverse pas la situation stratégique catastrophique de la Luftwaffe. Tout au plus l’expérience de ses pilotes pèse ponctuellement à une échelle tactique sur quelques opérations de l’ennemi. Nul doute qu’il n’a pas échappé aux membres de cette unité que désormais la tendance vers l’écrasement ne peut être renversée ni infléchie mais endoctrinés pour certains et le dos au mur pour tous ils continueront de se battre avec la même énergie.
Ce prestigieux Gruppe cessera d’exister à Straubing (Bavière) dans les premiers jours de mai 1945, dix années après sa création, dans l’incendie de ses derniers appareils qui ainsi ne pourront pas être capturés. Ainsi s’achève l’histoire de la plus ancienne unité de la Luftwaffe.
« Die Eule der Minerva beginnt erst mit der einbrechenden Dämmerung ihren Flug. » (« La chouette de Minerve ne prend son envol qu'au crépuscule qui commence. ») - Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1818)