Joannès CUCUMEL, originaire de Belley (Ain) est un pilote et « As » français avec neuf victoires confirmées à son actif, toutes obtenues durant la Campagne de France de 1940 ! Son parcours démontre, s’il le fallait encore, que les pilotes français étaient bien présents dans le ciel après l’invasion allemande du 10 mai et qu’ils ont courageusement participé à la lutte.
Il est né le 1er juin 1915 à Belley lieudit « Au Plâtre » (Ain) alors que les combats de la Première Guerre mondiale font rage en Artois (Pas-de-Calais) et en Belgique. Il est issu d’un milieu plutôt modeste qui n’a rien à voir avec le milieu militaire : son père Marin François et sa mère Marie-Germaine Imbert sont cultivateurs. Au début des années 1930, peu attiré par le travail de la terre, il devient mécanicien-ajusteur.
En 1935, son service militaire effectué, il s’engage et obtient son brevet de pilote. Il réussit dans cette voie et en juillet 1936, il intègre la 2e escadrille du groupe de chasse GC I/4. Pilote sur un Curtiss P-36 Hawk H75 -n°85, immatriculé X-884, codé « 7 »-, il est basé avec son unité à Wez-Thuisy près de Reims. Dès le premier jour de l’offensive allemande le 10 mai 1940 à 7h30, le sergent Cucumel obtient sa première victoire : il abat un Dornier Do 17Z du Stab./KG 76* qui tombe près de Buzancy au nord-ouest de Reims. Le lendemain deux autres victoires lui sont attribuées sur un Messerschmitt Me 109 du 2./JG 26 et sur un Heinkel He 111 H-2 du 3./KGr 126 près d’Anvers.
*Dornier Do 17Z, Stab/KG 76. L’équipage était composé de Fw. Kurt Baensch (pilote, décédé), Ltn. Otto Hams (observateur, décédé), Uffz. Hans Gauger (radio navigateur, décédé), Fw. Walter Röbler (mitrailleur, blessé mais réussit à sauter en parachute). La mission était une reconnaissance photo sur Cambrai.
Le 16 mai il rejoint la 4e escadrille du groupe de chasse GC II/9 alors basé à Châteauroux (Indre) et équipé de Bloch MB. 152. Trois jours après l’unité est transférée au Buc en région parisienne.
En quelques jours seulement le sergent-chef Joannès Cucumel, désormais chef de patrouille, va obtenir six victoires supplémentaires en collaboration :
- le 20 mai vers 13h30, lors d’une mission défensive conjointe avec le GC II/1 dans le secteur de Creil – Chantilly , il participe à la destruction en vol un Dornier Do 17P-1 du 4.(F)/A.Gr.11** entre Senlis et Crépy-en-Valois, au nord-est de Paris. La victoire lui revient ainsi qu’à trois autres pilotes : l’adjudant Becquet et le sergent Montfort du GC II/1 et le sergent Colomès du GC II/9 ;
- le 26 mai, alors que le GC II/9 a fait mouvement vers Connantre dans la Marne -où il restera stationné jusqu’au 12 juin-, deux patrouilles triples des GC II/9 et GC II/3 prennent leur envol à destination de la Somme. Avec le Capitaine Delfino, Cucumel abat vers 9h00 un Messerschmitt Bf 109E-3 du 9./JG 2*** , au nord de Moreuil dans la région d’Amiens ;
**Dornier Do 17P-1, « 6M+JM », 4.(F)/A.Gr 11, Fw. Paul Klafke (pilote), Uffz. Fritz Harlander (observateur) et Ogfr. Max Beer (radio navigateur), tous trois décédés. L’appareil effectuait une mission de reconnaissance sur Compiègne.
***Bf 109E-3, 9./JG 2, codé « 8+ » (hypothèse), Gefr. Erich Höhn (capturé après sauté en parachute).
Messerschmitt 109E-3 du 9./JG 2 abattu par le sergent-chef Cucumel et le capitaine Delfino le 26 mai 1940
- Le même jour peu après leur victoire sur le Bf 109, Delfino et Cucumel, ainsi que le lieutenant Chesnais et les sergents Pinson et Leschi, croisent un Henschel Hs 126 du 3.(H)/13**** qu’ils abattent à 9h15 et qui tombe entre Ham et Péronne, à l’Est d’Amiens ;
- le 3 juin il abat, en collaboration, un Dornier Do 17Z***** à Epernay au Sud de Reims ; un autre Do 17Z lui est accordé comme victoire probable;
- le 5 juin avec six autres pilotes, capitaine Delfino, lieutenant Chesnais, sous-lieutenants Faisandier et Ponneau, sergents Bernard et Daunizeau, il détruit un Henschel Hs 126****** près de Roye, à l’Est d’Amiens,
- le 6 juin à 12h15 il obtient sa neuvième victoire sur un Henschel Hs 126******* au nord de Soissons (Cf. détails de la mission ci-dessous).
Une dixième victoire probable en collaboration lui est attribuée.
Le 6 juin 1940, emmené par le Capitaine Delfino, il poursuit avec quatre autre Bloch de son unité un Henshel 126. L’appareil ennemi vole bas et joue l’appât afin d’amener les pilotes français à portée des canons anti-aérien. Le Hs 126 de son compatriote, qui avait tenté la même manœuvre peu avant, s’est fait abattre avant d’arriver à ses fins par le Sergent-chef Cucumel, qui obtenait ainsi sa neuvième victoire. Mais cette fois le piège semble fonctionner et le pilote Cucumel touché par la Flak se crashe avec son MB 152 n°612, codé « 10 ». Il tombe faubourg de Laon à Sémilly, au sud-est de Saint-Dizier (Haute-Marne). Joannès Cucumel, vingt-cinq ans et déjà titulaire de neuf victoires, a été éjecté et est grièvement blessé ; il est conduit par les Allemands à l’Hôpital de Saint-Quentin. Fait prisonnier quelques semaines avant l’Armistice, il ensuite est déporté en Allemagne d’où il est rapatrié un an plus tard. Réintégré à l’Armée de l’Air de Vichy et affecté à la Base aérienne de Salon-de-Provence à son retour, il rejoint peu après le personnel de la base aérienne d’Aulnat (Puy-de-Dôme).
Base d’Aulnat
Le 28 août 1942, alors qu’il est en mission de convoyage pour un vol Clermont – Pau et vole à 2000m d’altitude, l’un des moteurs du MB. 152 n°347 Y-834 codé « 16 » tombe en panne. Il cherche à se poser en catastrophe mais, dans le brouillard, il percute la cime d’un arbre et se crashe sur le territoire de la commune de Nonards non loin Brive-la-Gaillarde (Corrèze). Il totalisait 670 heures de vol.
Il est décédé en dehors de toute mission de guerre et la mention « non mort pour la France », peu flatteuse au regard de son engagement, figure donc dans son dossier. Il repose au cimetière de Saint-Germain-les-Paroisses près de Belley.
****Hs 126, 3.(H)/A.Gr. 13. Le pilote, Ofw. Ernst Bierwirth, succombe à ses blessures après avoir posé l’appareil en catastrophe dans un champ, son observateur (inconnu) survit.
*****Deux Do 17Z sont abattus ce jour-là dans ce secteur Épernay – Reims : l’un appartenant au 3./KG 3 par le GC I/5 et le GC II/9 en collaboration, l’autre du 6./KG 76 par le GC II/9.
******Hs 126, 1.(H)/A.Gr. 23, Uffz. Fritz Drexl (pilote) et Oblt. Werner Staudinger (observateur), tous deux blessés dans l’atterrissage d’urgence.
*******Hs 126, 4.(H)/A.Gr. 22, Ofw. Horst Köhler (pilote) et Oblt. Ulrich Schlichting (observateur), tous deux décédés.
Bloch MB. 152 n°347 Y-834 codé "16" en mission de convoyage, piloté par Joannès Cucumel le 28 août 1942 lorsque l'un des moteurs tombe en panne. L'avion se crash en Corrèze.
Décorations
Joannès Cucumel se voit décerner la Légion d'Honneur, la Médaille Militaire, la Croix de guerre 1939/1945 avec palme, et six citations à l'ordre de l'Armée.
Sources
Memoiresdeshommes.sga.defense.gouv.fr
Acte de naissance, Archives départementales de l’Ain, cote FRAD001 EC 2014 43, Belley 1915Bibliographie et webographie
Cf ouvrage de J. GISCLON « La grande aventure de la chasse française de 1939 à 1945 » P190-191
« Les aviateurs de l’Ain », Cercle Aéronautique Louis Mouillard (CALM)
Passionair1940.fr
Francecrashes39-45.net
http://frenchaces.pagesperso-orange.fr/as/m+a_b.html
http://www.cieldegloire.com/004_cucumel_j.php