Depuis le début du mois de septembre 1944, la base aérienne de Bron est témoin d’incessants ballets aériens des unités alliées. Tout est allé très vite après le 3 septembre et la libération de Lyon et de sa banlieue : la piste de l’aérodrome, très endommagée par les bombardements, est rendue praticable par le Génie américain. Quelques jours après seulement, des unités de chasse anglaises, françaises et américaines ont pu décoller pour des missions d’attaques au sol des troupes allemandes en retraite en Bourgogne. Parallèlement, un pont aérien a été mis en place entre Bron et le sud de l’Italie afin d’acheminer du carburant pour les avions.
En octobre 1944 ces unités, suivant la progression des Allemands maintenant dans les Vosges, sont parties plus au nord et le pont aérien a été interrompu. Malgré tout Bron reste un aérodrome charnière où notamment des unités de transport américaines, qui acheminent des troupes et du ravitaillement, font escale entre le Front et l’Italie.
Le 31 octobre au matin, trois avions de transport C 47 de la XIIth Air Force - 6Oth Transport Carrier du XIIth Troop Carrier- se préparent au décollage. Leur mission est de transporter du personnel du 347th Replacement Depot à destination de Pontedera en Italie, non loin de Pise. A bord de l’avion n°42-23469 quatre membres d’équipage s’activent: le pilote, second Lieutenant Wayne W. Agee, le co-pilote, premier Lieutenant Edmond A. Marquis, le Caporal George C. Fernback, mécanicien et le Sous-Sergent Nicholas M. Moccia, radio. Quatorze passagers les rejoignent bientôt : John W. Francis, Anthony V. Gabriel, Ted H. Gersh, Morris Gettleman, Seymour Eicone, Albert J. Zepparri, Harold P. Fortinsky, Edwin R. Gartski, Clarence Jr Francisco, William Fagleman, Marion Elsner, Jack H. Wilcox, Howard Dunn et un inconnu.
Les trois C 47 décollent à destination du sud. La visibilité est bonne mais le plafond est bas. Les appareils suivent la Vallée du Rhône tout en volant à un mile d’intervalle. A dix miles – environ 16 kilomètres - au nord de Tournon-sur-Rhône, le flight leader estime que le plafond s’est abaissé et que la visibilité a diminué. Il décide de faire monter la formation à 2500 pieds – un peu moins de 800 mètres d’altitude-. Le Lieutenant Agee aux commandes du C47 n°42-23469 commence suivant les ordres à monter mais alors que l’avion progresse, une colline émerge du brouillard, juste devant. Le pilote réalise qu’il vole encore trop bas et il tente alors d’accélérer la montée. Mais il est trop tard : l’avion heurte le sommet de cette colline. Sa vitesse le déporte dans un petit ravin près du Hameau des Pierres, lieudit la Fontaine du Château, sur le territoire de la commune de Tournon-sur-Rhône où il se crashe partiellement en feu après s’être cassé en deux.
Le choc est terrible : le pilote et trois soldats, Dunn, Fortinsky et l'inconnu meurent carbonisés. Les quatorze autres sont pris en charge par les pompiers de Tournon, la gendarmerie et des groupes FFI de la région qui participent à l’évacuation des blessés dans des charrettes. Marquis, Moccia et Fernback, plus gravement touché, sont emmenés à l’hôpital de Tournon puis transférés à celui de Chalon-sur-Saône. Les dépouilles sont acheminées à la morgue de Tournon avant leur inhumation au cimetière américain de Montélimar. Plus tard, Dunn sera rapatrié aux Etats-Unis et les corps de Agee et Fortinsky transférés au cimetière américain de Draguignan.
L’épave du C47 restera en place une dizaine d’années avant que l’Armée de l’Air ne récupère les restes.
En 2011, le fils d’Edwin Gartski, après plusieurs années de recherche depuis les Etats-Unis, est venu à Tournon-sur-Rhône voir le lieu de l’accident dont son père lui avait parlé. Il a pu rencontrer alors un certain Aimé Brochier qui, jeune adolescent à l’époque, avait apporté son aide au transport des blessés du crash du C47.